Le jeudi après midi, le programme proposait aux pèlerins extérieurs à l’Hospitalité une « marche vers l’EsSen[s)tiel » : « Découvrir toutes les beautés de la Création à partir d’une animation déambulatoire à vivre à travers nos sens ».

Cette marche était proposée par le CCFD-Terre Solidaire, le Comité Catholique contre la Faim et pour le Développement. Lisette Prost, la permanente du CCFD à Lourdes en a eu l’idée en lisant Laudato Si’, l’encyclique du pape François. La Marche vers l’Essen[s]tiel propose à chacun de cheminer personnellement et en communauté. Pour cela il est aidé par un texte de la Bible, les réactions des autres participants, une parole d’un témoin engagé dans le développement et des questions qui invitent à la méditation et à la réflexion. Le lieu de rendez-vous était fixé au pied de la statue de la Vierge couronné.

Six personnes ont répondu à l’invitation dont deux de 93 ans en fauteuil roulant. Il y a là Michèle de Rouillac, Michèle de Theil-Rabier, Marie-Reine de Rouillac, Frère Pierre de Segonzac, Sylvie d’Angoulême et Marcelle sa maman. « Une eau pure et d’une grande fraîcheur » Comme il est 17 heures, on ne peut pas passer par la rive droite du Gave, en raison du rassemblement pour la procession du Saint Sacrement.

Le petit groupe la marche à la Sainte Vierge par un « Je vous salue Marie », puis passe devant la grotte et rejoint les fontaines. Le premier sens à mettre en œuvre va donc être le goût en buvant l’eau de la source qui jaillit de la grotte.

Tous les participants jouent le jeu. Ils boivent l’eau de Lourdes, ferment les yeux, la laissent bien remplir leur bouche et couler en eux. Un peu plus loin, dans la prairie, ils en parleront avec émotion :

– « C’est une eau pure, d’une grande fraîcheur, d’une grande douceur, limpide au goût … Je l’ai sentie descendre jusque dans ma poitrine … »

Marcelle dit : « Nous avons beaucoup de chance d’avoir de l’eau comme ça par rapport à d’autres pays où les femmes vont chercher de l’eau très loin ».

Frère Pierre dit qu’il a rapporté deux fois de l’eau e Lourdes pour des baptêmes. « J’aime toucher, j’ai besoin de toucher »

L’étape suivante mettra en valeur le sens de l’odorat. Pour cela, le groupe va s’arrêter à côté des cierges qui brûlent.

Quelqu’un dira ensuite : « L’odeur m’a rappelé celle de la lumière de Bethléem distribuée dans nos paroisses à Noël pour que nous la ramenions dans nos foyers »

… Mais une autre personne dans le groupe réagira autrement : « J’ai vécu un incendie. J’étais dans l’émotion de ce souvenir ».

La marche continue au bord du Gave ne direction du Chemin de Croix pour les malades.Le groupe s’arrêtera successivement pour vivre le sens du toucher puis celui de l’écoute.

Pour ces deux sens les partages seront très riches. On touche en fermant les yeux : des sensations, des souvenirs, des joies remontent … « J’aime toucher les arbres ; j’ai beaucoup d’affection pour eux … »

Sylvie qui était infirmière raconte : « J’aime toucher, j’ai besoin de toucher, j’aime bien prendre quelqu’un dans les bras. Une fois pour rassurer un homme qui avait un début d’infarctus, j’ai posé mes mains sur sa poitrine.

Il m’a dit : je n’ai plus mal … » A propos de l’ouïe quelqu’un dira : « J’ai beaucoup aimé le bruit de l’eau du Gave. Le bruit de l’eau m’apaise, me repose. J’aime bien écouter quelqu’un, le regarder dans les yeux. J’aime bien les bruits de la nature. Je retrouve Dieu. Je prie beaucoup quand je marche dans la nature ». Une autre dira encore : « J’aime écouter, mais pas toucher. Quand quelqu’un est triste, heureux … on ressent ses sentiments ».

Le monde à l’envers avec la carte Peters Le dernier sens à faire vivre était la vie. Nous aurions pu remonter un peu dans la prairie pour admirer les basiliques et le château … Mais le CCFD-Terre solidaire nous avait donné des cartes Peters, ces planisphères où le sud est en haut et où le milieu de la carte est centré sur l’équateur.

Les réactions n’ont pas tardé : « Mais cette carte est à l’envers… Pourquoi elle est comme ça ? On est formaté … »

Représenter le globe terrestre sur une carte relève de diverses conventions. Mettre le nord en haut est une convention. Déplacer le milieu de la carte vers le haut est encore une autre convention qui valorise les pays riches au dépend des pays pauvres.

Pour changer notre regard, le CCFD-Terre Solidaire distribue ces cartes Peters. En conclusion, chacun a pu dire comment il avait vécu cette « Marche vers l’EsSen[s]tiel » :

On a besoin de temps en temps de se situer, s’attarder dans le réel : ça nous fait prendre conscience des réalités du monde … C’est important.

J’ai trouvé très intéressant de travailler ainsi sur nos sens, de nous poser ; ça nous a aidés à nous connaître, à nous écouter, à réfléchir ensemble. On est ici dans un endroit non pollué avec une dimension spirituelle… »

JP MALGOUYRES